Les dégâts des eaux constituent l’écrasante majorité des sinistres. Certaines questions récurrentes se posent qui concernent aussi bien les démarches à accomplir que la gestion du sinistre par les compagnies d’assurances.
Une nouvelle convention entre assureurs entrée en vigueur en juin 2018, la convention IRSI (Indemnisation et Recours des Sinistres Immeuble), a érigé des règles nouvelles notamment en matière de recherche de fuite et se traduit aussi par la mise en jeu plus systématique de l’assurance propriétaire non occupant. Il est donc utile de faire le point sur le fonctionnement des assurances en matière de dégât des eaux.

Qui doit déclarer le sinistre à son assurance ?

Toute personne concernée par un dégât des eaux, qu’elle soit à l’origine ou victime d’un sinistre doit en faire la déclaration à son assurance.

  • Le locataire

Le locataire, victime ou à l’origine d’un dégât des eaux, doit en faire la déclaration auprès de sa compagnie d’assurance. Il informe également le propriétaire ou le gérant du local sinistré.

Il est utile de rappeler que, dans le cadre de loi de 1989  qui régit la majeure partie des locations de logements d’habitation à titre de résidence principale, le locataire a l’obligation de souscrire une assurance multirisque habitation et de justifier de sa souscription auprès du propriétaire bailleur (article 7g de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989). Cette assurance le garantit contre les risques d’explosion, d’incendie et de dégât des eaux.

  • Le copropriétaire non occupant

Le copropriétaire non occupant peut être lui aussi être amené à déclarer un dégât des eaux auprès de sa compagnie d’assurance, par exemple dans le cas où des dommages affectent les parties immobilières privatives et les embellissements du logement ou encore lorsqu’un sinistre a son origine dans le local dont il est propriétaire (fuite sur une canalisation privative par exemple) et affecte un autre local.

Rappelons que, dans un local en copropriété, aux termes de la loi de 1965 relative au statut de la copropriété (article 9-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965), le copropriétaire non occupant (aussi bien que le copropriétaire occupant) a l’obligation de s’assurer contre les risques de responsabilité civile dont il doit répondre.

Quelle déclaration, dans quel délai ?

La déclaration doit être faite dans un délai de 5 jours ouvrés à compter de la découverte du sinistre par courrier recommandé avec accusé de réception.

Cette déclaration doit comprendre :

  • Coordonnées de l’assuré (nom, adresse) et références du contrat d’assurance
  • Circonstances du sinistre (date, heure, lieu)
  • Description des dommages concernant les biens de l’assuré et ceux des tiers le cas échéant (voisins, propriétaire, syndic)
  • Eléments permettant une estimation des meubles et objets détruits ou détériorés (factures, relevés bancaires, photos,…)

L’utilisation d’un « constat amiable de dégât des eaux » est vivement recommandée même dans le cas où il est impossible de le remplir avec le responsable (présumé) à l’origine du sinistre.  Un formulaire de constat peut être obtenu auprès des compagnies d’assurances ou téléchargé sur internet.

Le locataire doit adresser un exemplaire du constat au propriétaire ou au gérant de l’immeuble sinistré.

Comment interviennent les assurances ?

  • Application de la convention IRSI pour les dommages jusqu’à 5.000 € HT

La convention IRSI est une convention inter-assurances entre compagnies adhérentes de la Fédération française de l’assurance.

Pour les sinistres survenus à compter du 1er juin 2018, la convention IRSI s’applique lorsque certaines conditions sont réunies dont celles qui suivent (énumération non exhaustive) :

  • Dommages matériels inférieurs à 5.000 € HT par local sinistré
  • Sinistre survenu dans un Immeuble locatif (en pleine propriété, en copropriété ou en indivision)
  • Mise en cause de 2 assureurs adhérents au moins.

La convention CIDRE n’est donc plus applicable aux sinistres survenus après le 1er juin 2018. La convention CIDE Cop reste applicable aux sinistres dans une copropriété lorsque le montant des dommages est supérieur à 5.000 € HT (alors qu’elle s’appliquait à partir de 1.600 € auparavant).

Toutes les causes sont couvertes sauf certaines causes de dégâts qui sont expressément exclues de la convention IRSI (fonctionnement en « toutes causes sauf »), notamment:

  • Infiltrations par façades, murs enterrés, menuiseries extérieures
  • Phénomènes de condensation ou d’humidité sans relation avec un dégât des eaux
  • Pénétrations d’eau par les ouvertures des gaines de ventilation, les conduits de cheminées
  • Eaux de ruissellement, débordements de cours d’eau, remontées de nappes phréatiques, refoulement d’égout, inondations

Il est à noter que lorsque la cause du sinistre est indéterminée, la convention IRSI est applicable.

Les règles introduites par cette convention sont les suivantes.

Un « gestionnaire » est responsable, pour chaque local sinistré, de gérer le sinistre. Ce gestionnaire est responsable d’organiser la recherche de fuite si cette recherche n’a pas été effectuée ou n’a pas permis d’identifier et de localiser l’origine de la fuite. Il est aussi responsable de l’évaluation des dommages.

Le gestionnaire est l’assureur de l’occupant du local sinistré. Si plusieurs locaux sont sinistrés, il y a autant de gestionnaires que de locaux sinistrés.

Local sinistré Assureur gestionnaire
Local privatif occupé par le propriétaire assureur du propriétaire
occupé par un locataire en location nue assureur du locataire (1)
occupé par un locataire en location meublée ou saisonnière assureur du propriétaire non occupant (PNO)
non occupé assureur du propriétaire non occupant (PNO)
Parties communes assureur de la copropriété

(1) Si le locataire n’est pas assuré ou a donné ou reçu congé à la date du sinistre, le gestionnaire est l’assureur du propriétaire non occupant (PNO) ou encore celui de l’immeuble dans le cas où le propriétaire n’est lui-même pas assuré

Pour un local loué en location nue, l’assureur gestionnaire est donc l’assureur du locataire.

La convention IRSI prévoit 2 tranches de dommages :

  • Dommages (matériels et frais afférents) d’un montant inférieur ou égal à 1.600 € HT par local sinistré :

. évaluation des dommages par tout moyen (pas d’obligation d’expertise) ;

. prise en charge  par l’assureur gestionnaire sans possibilité de recours contre les autres assureurs, sauf exceptions (sinistres répétitifs, c’est-à-dire plus de 2 sinistres dans les 24 derniers mois)

  • Dommages (matériels et frais afférents) d’un montant supérieur à 1.600 € HT et inférieur ou égal à 5.000 € HT par local sinistré :

. expertise obligatoire unique pour compte commun (non contradictoire)  par local sinistré à l’initiative de l’assureur gestionnaire ;

. prise en charge par l’assureur du propriétaire des biens sinistrés :

 => locataire : embellissements et mobilier du locataire

 => propriétaire : embellissements et parties immobilières privatives

. recours possible pour leur coût réel.

C’est l’assureur gestionnaire du local sinistré qui désigne les assureurs des propriétaires des biens endommagés qui doivent prendre en charge les dommages en application d’un barème fixé par la convention.

Précision qui peut avoir son importance : si la responsabilité civile professionnelle d’un « tiers à l’immeuble » prestataire ou vendeur est engagée, la convention IRSI reste applicable uniquement en tranche 1.

  • Application de la convention CIDE Cop (Convention d’indemnisation des dégâts des eaux dans la copropriété) ou des règles de droit commun pour les dommages supérieurs à 5.000 € HT

La convention CIDE Cop pour un sinistre en copropriété

La convention CIDE Cop s’applique lorsque plusieurs conditions sont réunies :

  • Sinistre dans un immeuble soumis au statut de la copropriété
  • Mise en cause de 2 assureurs adhérents au moins
  • Dommages aux embellissements/aménagements, et/ou au mobilier, et/ou aux parties immobilières privatives ou communes

La prise en charge des dommages revient à l’assureur du « lésé », notion qui est au centre de cette convention.

La convention définit trois catégories de lésés :

  • Le copropriétaire occupant (étant précisé que le copropriétaire d’un appartement vacant est considéré comme tel) lorsque les dommages concernent les dommages aux embellissements définis limitativement par la convention (et comprenant par exemple les éléments de cuisines ou salles de bains aménagées) ainsi que les dommages au mobilier
  • Le locataire occupant lorsque les dommages concernent les embellissements entendus comme « tous aménagements de nature immobilière ou mobilière exécutés à ses frais ou repris avec un bail en cours dès lors qu’ils ne sont pas devenus la propriété du bailleur »
  • La collectivité lorsque les dommages concernent les parties immobilières privatives et les parties communes

Les parties immobilières privatives sont constituées des parties immobilières privatives du copropriétaire occupant autre que les embellissements et des aménagements de nature immobilière ou mobilière lui appartenant.

Il en résulte que l’assureur de l’immeuble a la charge d’indemniser les dommages immobiliers causés aux parties privatives immobilières du copropriétaire bailleur et les dommages aux embellissements dont il est propriétaire.

Le droit commun des assurances s’applique en dehors du champ d’application de la convention CIDE Cop, pour un sinistre n’intervenant pas dans une copropriété par exemple.

Qui prend en charge la recherche de fuite ?

Dans le cadre de la convention IRSI

Dans le cadre de la convention IRSI, il est important de relever que « tout contrat garantissant les locaux privatifs est réputé garantir les frais de recherche de fuite au titre de la garantie dégâts des eaux » et ce quelles que soient les clauses du contrat existant.

Toute personne intéressée peut procéder à la recherche de fuite en amont de la déclaration du sinistre à l’assurance, notamment lorsque les circonstances l’exigent. La recherche de fuite effectuée en amont de la déclaration du sinistre est à la charge de l’assureur personnel de celui qui en a pris l’initiative (occupant, propriétaire du local sinistré, voisin, syndic, gestionnaire d’immeuble).

Lorsque la recherche de fuite n’a pas été effectuée en amont, le gestionnaire du local sinistré organise la recherche de fuite (dont le montant des frais entre alors dans la détermination de la tranche).

Cette prise en charge inclut les frais du professionnel qui est intervenu et les frais de remise en état des biens endommagés par les investigations effectuées.

En revanche, les coûts de réparation de la cause du sinistre (par exemple, réparation de la canalisation à l’origine du sinistre) sont exclus de la prise en charge.

Hors du cadre de la convention IRSI

Il faut garder à l’esprit que, lorsque les conditions d’application de la convention IRSI ne sont pas réunies, par exemple dans le cas de dommages d’un montant supérieur à 5.000 € HT, la prise en charge du coût de la recherche de fuite est fonction de l’origine de la fuite : copropriété (origine dans les parties communes), propriétaire (origine dans les parties privatives) ou locataire (en cas de défaut d’entretien à l’origine de la fuite).

Dans le cas d’une origine privative, Il faut se reporter aux clauses du contrat d’assurance multi risque habitation ou propriétaire non occupant pour savoir si la recherche de fuite est incluse ou non.

Dans quels cas l’assurance Propriétaire Non Occupant (PNO) est-elle mise en jeu dans le cadre de la convention IRSI ?

Intervention de l’assureur PNO en tant que gestionnaire du sinistre

L’assureur gestionnaire est l’assureur du propriétaire non occupant d’un local sinistré dans plusieurs cas :

. lorsque le local est vacant ;

. en cas de congé donné au locataire ou reçu par le locataire, au plus tard à la date du sinistre ;

. en cas de location meublée  et de location saisonnière ;

. à titre subsidiaire, en cas de défaut d’assurance du locataire d’un logement non meublé.

Mise en jeu de l’assurance PNO dans l’indemnisation

Même si le gestionnaire du sinistre n’est pas l’assureur du propriétaire non occupant, l’assurance PNO peut être mise en jeu. En effet, comme il a été indiqué plus haut, pour des dommages d’un montant compris entre 1600 € et 5000 € HT, l’assureur du copropriétaire non occupant intervient pour l’indemnisation des parties immobilières privatives et des embellissements dont son assuré est propriétaire.

La convention IRSI est applicable aux sinistres incendies

Signalons que la convention IRSI ne s’applique pas seulement aux dégâts des eaux mais aussi aux sinistres incendies.

Les causes exclues sont les suivantes :

. Phénomènes naturels (foudre, éruption volcanique)

. Evènement relevant du régime des catastrophes technologiques

. Evènement imputable à un ou plusieurs Véhicules terrestre à Moteur

Exemples concrets de mise en jeu de la convention IRSI

Notre exemple concerne un dégât des eaux en copropriété. Une fuite affectant une canalisation d’eaux usées de l’immeuble affecte le logement occupé par un locataire. Les montants sont des montants hors taxes.

1er cas : dommages chiffrés à 1.300 €

Le local sinistré est l’appartement occupé par le locataire. L’assureur gestionnaire désigné par la convention est donc l’assureur du locataire. La cause du sinistre n’ayant pu être identifiée et localisée préalablement à son intervention, l’assureur gestionnaire organise la recherche de fuite. Dans notre exemple, l’assureur gestionnaire n’a pu identifier et localiser la cause et/ou l’origine du sinistre et c’est alors l’assureur de l’immeuble qui doit organiser la recherche de fuite.

Le montant du sinistre est chiffré comme suit :

Postes Dommages
Mobilier locataire 600 €
Immobilier propriétaire
(ex: parquet d’origine)
700 €
Total 1.300 €

Le montant des dommages est inférieur à 1600 € et il s’agit donc un sinistre de la tranche 1.
Si l’assureur gestionnaire avait pu identifier et localiser la cause et l’origine du sinistre, le coût de la recherche de fuite serait rentré dans la détermination de la tranche.Mais dans notre exemple, les frais de recherche de fuite restent à la charge de l’assurance Multi Risques Immeuble sans recours possible (sauf montant supérieur à 1.600 €) et sont exclus de l’assiette servant à la détermination de la tranche.
S’agissant d’un sinistre de la tranche 1, l’assureur du locataire évalue l’intégralité des dommages avec ou sans expertise. Il prend à sa charge l’intégralité des 1.300 € de dommages sans recours possible contre les autres assureurs (sauf sinistres répétitifs).

2ème cas : dommages chiffrés à 2.600 €

Dans ce deuxième cas, le montant du sinistre est chiffré comme suit :

Postes Dommages
Mobilier locataire 1.200 €
Immobilier propriétaire
(ex: parquet d’origine)
1.400 €
Total 2.600 €

Il s’agit ici d’un sinistre de la tranche 2. L’assureur gestionnaire organise une expertise avec un expert unique pour compte commun qui chiffre l’intégralité des dommages. L’assureur gestionnaire prend à sa charge les dommages du locataire (1.200 €) et adresse son rapport à l’assureur du propriétaire non occupant pour la prise en charge des dommages qui lui reviennent (1.400 €). Des recours sont possibles de la part des assurances du locataire et du propriétaire contre l’assurance de l’immeuble, une canalisation de l’immeuble étant à l’origine du sinistre.